Trésors humains vivants
C’est une conception relativement récente dans le domaine du patrimoine culturel immatériel. Cela consiste en des personnes possédant des savoirs particuliers, des compétences et des savoir-faire uniques en relation avec un métier, une technique ancestrale, un domaine particulier de la vie et de la subsistance et qui sont menacés de disparition sous l’effet du modernisme, de la mondialisation et, plus généralement, des transformations de la société et des mentalités.
De par la richesse de son artisanat, de son répertoire chorégraphique et musical, des techniques et des savoirs intervenant dans l’exploitation des ressources naturelles, le Maroc possède encore des individus qui détiennent ce qualificatif de « Trésors humain vivants ». Il est impératif d’œuvrer à la sauvegarde de leurs savoirs et de leurs techniques en les encourageant à transmettre leur héritage inestimable aux générations futures.
Exemple Thamimunt
Provenance : Douar Idardouchen (Ouled Ben Amar/Aït Ouriaghel ; Rif central : Province d’El-Hoceima)
Savoir-faire : Poterie féminine
Description : Native du Douar Idardouchen (Ouled Ben Amar/Aït Ouriaghel ; Rif central : Province d’El-Hoceima).
Après l’extraction de l’argile à proximité des lieux, celle-ci est concassée à l’aide d’un bâton en bois et tamisée par les filles de la maison. Thamimount pétrie l’argile mélangée à l’eau. Pour consolider la pâte, la potière utilise un dégraissant constitué essentiellement d’anciens vases de poterie cassés et des débris de pierre broyés. La pâte est modelée sans tour. Thamimount utilise, en effet, une plaque en bois ou en poterie posée sur un support lapidaire ou de poterie permettant ainsi la rotation et le modelage. Les vases sont montés en ajoutant des colombins.
Après le séchage, Thamimount poli ses oeuvres par un racloir en bois. Le lissage se fait à l’aide d’une pierre (galet). L’engobage est terreux. La cuisson se fait à même le sol, dans une fosse ; les vases sont couverts par des feuilles de cactus. Thamimount décore les vases avec une matière extraite d’une plante appelée en tarifit (parler amazigh local) : fadis en moyen d’un morceau de peau et poil de chèvre. Les feuilles du fadis sont pilées avec de l’eau dans un mortier en bois ; un liquide vert est obtenu en froissant ce contenu dans un torchon. À ce liquide, la potière ajoute du sucre qui donne la brillance à la décoration et avec l’oxydation, la couleur se convertit en marron.
La potière décore entièrement la partie externe y compris la base. Elle utilise, pour ce faire, un champs de décoration très varié : dessins géométriques, motifs d’inspiration végétale, décors anthropomorphes.
Les mains de la potière façonnent plusieurs formes de vases : gobelets, vases avec ou sans goulot servant à boire, contenir et verser eau, lait, miel,…
Après la décoration, les vases sont enfournés dans un four à pain. Après cette opération de cuisson, les décors acquièrent une couleur brune foncée à noire et brillante.
Actuellement, et en vue de la sauvegarde de ce noble métier et art au féminin, une “Coopération des Femmes d’Idardouchen pour la Production et la Commercialisation de Poterie” a été créée. Thamimount encadre les filles et les femmes de ce centre pour transmettre son savoir et savoir-faire aux générations plus jeunes.